Malika Séguinau, secrétaire générale du Prodiss — créateur du think tank Proscenium —, nous le disait il y a peu : le Big Data (« données massives » en français) sera le futur moteur de l’économie de la culture. Mais au fait, qu’est-ce que le Big Data ? Comment impacte-t-il le monde du spectacle vivant et ses spécificités ? C’est l’objet de notre article d’aujourd’hui.
Big Data : une définition
Qu’il est difficile de donner « la » définition de Big Data, tant ce concept recouvre des réalités différentes ! C’est pourquoi nous préférons vous donner « une » définition, celle qui parlera le plus aux professionnels du spectacle vivant que vous êtes.
Un constat, tout d’abord : il y a tellement de nouvelles données disponibles, que la manière de les traiter et de les analyser change radicalement par rapport à tout ce que l’on a connu jusqu’à présent. Ce phénomène, c’est celui du Big Data. Il est caractérisé par :
- un volume inédit de données produites et échangées sur de nombreux canaux différents apparus plus ou moins récemment dans le domaine du spectacle vivant, des services en ligne aux objets connectés, en passant par les banques de données ;
- des données extrêmement variées, parfois non structurées et volatiles (c’est-à-dire, qui disparaissent naturellement ou sont automatiquement effacées par un logiciel à intervalles réguliers) ;
- une grande vitesse dans les échanges de données.
Le Big Data fait donc naître, y compris dans le secteur culturel, de nouvelles pratiques. Et il nécessite de nouveaux outils… qui n’existent peut-être pas encore forcément.
Le Big Data et la culture : un couple à inventer ?
Le Big Data ? Ni plus ni moins que, de l’avis de nombreux observateurs, le nouvel « or noir de l’ère numérique ». Et pour cause : les solutions numériques se démocratisent : billetteries en ligne, solutions de gestion, agendas culturels… Les acteurs du secteur, y compris dans le monde du spectacle vivant, se multiplient.
Résultat : il y a de plus en plus de données produites. Les interactions des publics avec les professionnels, via les plateformes numériques et les objets connectés, sont chaque jour plus nombreuses. Derrière le Big Data, le véritable enjeu est donc bien l’exploitation de ces données.
Heureusement, dans le secteur du spectacle vivant, des solutions existent déjà pour, par exemple, mieux connaître son public et son comportement :
- Delight, par exemple, réutilise les données issues des billetteries en ligne et des réseaux sociaux pour proposer des outils d’analyse permettant de connaître les goûts des spectateurs et de mieux piloter ses actions de communication ;
- Digitick, pour sa part, est l’un des rares réseaux de distribution à accepter d’ouvrir ses données, ouvrant la voie à une réutilisation de celles-ci ;
- Les bracelets connectés utilisés notamment durant les festivals permettent par exemple, via une fine analyse des données, de mieux gérer les flux de spectateurs durant l’événement — c’est ce que propose, notamment, la solution belge Playpass…
Le Big Data et l’analyse des données qu’il nécessite peuvent également « servir » du côté des spectateurs. Lesquels bénéficient par exemple de services de recommandation de spectacles ou d’événements.
Le Big Data, une arme à double tranchant ?
Attention, le Big Data ne constitue pas — encore ? — la panacée pour les professionnels du spectacle vivant. Première limite, qui sautera aux yeux de tous : la confidentialité des données personnelles. Un usage abusif de ces données pourrait porter directement atteinte à la vie privée et aux libertés individuelles. Les risques sont même plus larges : marketing intrusif, surveillance massive par les possesseurs des données, discrimination, harcèlement des individus à partir de leurs informations culturelles…
De plus, peut-on faire confiance à un algorithme pour « cartographier » des données culturelles ? N’est-ce pas prendre le risque d’enfermer les spectateurs dans leurs goûts, et de réduire leur envie de découvrir « autre chose » ?
Le monde du spectacle vivant doit donc encore s’approprier, ou se réapproprier, les masses de données captées — souvent, du reste, par des acteurs extérieurs, notamment dans le domaine de la billetterie. Une nouvelle ère s’ouvre sans doute pour le monde de la culture : celle de l’open innovation. Elle repose sur un partage des données pour créer de la valeur, dans le respect des spectateurs et de la confidentialité des données qu’ils ont accepté de confier aux structures du spectacle vivant. Elle s’appuie sur un constat : quand un domaine est nouveau, c’est à plusieurs que l’on est le plus fort, et que l’on perd le moins de temps à faire tous la même chose !
Après avoir principalement atteint les secteurs techniques et industriels, le Big Data est mûr pour proposer des enjeux intéressants pour le monde du spectacle vivant. Et vous, qu’en attendez-vous ? Êtes-vous prêt à vous mettre à l’open innovation ? Prenez la parole dans les commentaires !